Un passage du passé
Le Passetto di Borgo est à nouveau visible. La réouvert en 2024 a été rendue possible grâce à la collaboration entre la Surintendance spéciale de Rome, qui a supervisé les travaux de mise en sécurité, de conservation et de restauration, et la Direction générale des musées. « Er Coridore de Borgo » comme l’appelaient les romains de la Rome papale, aujourd’hui connu sous le nom de Passetto di Borgo, correspond à ce tronçon élevé et fortifié des murs du Vatican qui, du Palais apostolique du Vatican, partant de derrière la colonnade du Bernin, longe la Via dei Corridori et la Via Borgo Sant’Angelo et finit à l‘intérieur du Château Saint-Ange.
Au début des remparts
Le Passetto di Borgo s’installe sur une structure défensive qui se dénouait du pied de la colline du Vatican jusqu’au mausolée d’Hadrien. Les remparts avaient été crées pour protéger le camp militaire du roi des Goths, le barbare Totila qui avait assiégé Rome vers 547. Les remparts de dimension modeste, avaient été construit avec de gros blocs de tufs à l’aspect grossier. On peut en voir encore un bout près de Porta Castello. Vers 852, le pape Léon IV fait bâtir un mur d’environ 5 mètres de haut, avec un chemin de ronde, pour protéger la basilique Saint-Pierre et les bâtiments voisins des invasions des sarrasins. Ils avaient saccagés par deux fois la grande basilique de saint Pierre.
Le Passetto di Borgo un couloir médiéval
Certains chercheurs pensent que le Passetto de Borgo a été construite vers 1277, sous le pontificat de Nicolas III, le premier à quitter le palais du Latran pour s’installer au Vatican près de la basilique de saint Pierre. Nicolas III était issu de la noble famille Orsini alors propriétaire du château saint-Ange. D’autres pensent que les travaux commencèrent sous Boniface IX entre 1389 et 1404, et se terminèrent avec Baldassarre Cossa, ou l’antipape Jean XXIII, un pape du début du XVe siècle, fils de pirates. Alors que l’antipape Jean XXIII était sous procès à Constance, son secrétaire Poggio Bracciolini, qui avait pu s’enfuir, avait découvert dans un couvent du nord, dans la bibliothèque du couvent de Fulda en Allemagne, le fameux manuscrit De Rerum Natura de l’écrivain latin Lucrèce.
Ses transformations aux cours des siècles
Au cours des siècles, le Passetto de Borgo a subi de nombreuses modifications. Il a été rénové à plusieurs reprises et par plusieurs papes pour améliorer ses prestations. Les transformations les plus significatives ont eu lieu sous les papes Nicolas V, Sixte IV et Alexandre VI Borgia. On a ajouté un chemin de patrouille, des créneaux, des tours de guet, des fortifications, des élévations et des bastions. Le Passetto de Borgo était destiné à contrôler la zone du Borgo en contrebas et à réprimer d’éventuelles émeutes. Grâce à la position élevée d’où l’on pouvait facilement tirer des flèches ou lancer des pierres et se défendre.
Un passage pour la prison
Il servait aussi à conduire les prisonniers d’un certain rang dans les cachots du château saint Ange. C’était la terrible prison secrète des papes d’où difficilement on en sortait vivant. C’est peut-être ce tronçon qu’une illustre prisonnière comme Béatrice Cenci, enchaînée, a parcouru dans le plus grand secret, avant sa décapitation en 1599. Mais aussi, et surtout, le Passetto de Borgo était destiné à fournir une voie de fuite rapide aux Papes qui, en cas d’agression ou d’attentat. Ils pouvaient s’enfuir du Vatican pour se réfugier dans les murs épais et bien protégés du château saint-Ange. Son importance stratégique s’est révélée particulièrement dans les périodes les plus sombres et douloureuses de l’histoire de Rome et l’Église.
Les faits dramatiques de l’histoire du Passetto
En 1494, lorsque le pape Alexandre VI Borgia a parcouru les 800 mètres du Passetto di Borgo pour se refuge au château Saint-Ange. La milice de Charles VIII roi de France, qui était venue se battre à Naples et elle avait envahi et saccagé Rome. Ou en 1527, lorsque Clément VII Médicis s’enferma au Château Saint-Ange lors du sac de Rome perpétré par les lansquenets de l’empereur Charles V. Le pape se sauva de justesse, courant le long du passage étroit, tandis que les courtisans et les nobles qui l’accompagnaient le protégeaient d’un manteau sombre, pour éviter que sa robe blanche ne devienne une cible facile. Benvenuto Cellini, peintre, orfèvre et ingénieur militaire aurait fait abattre le dernier tronçon passage pour empêcher aux lansquenets de rentrer dans la forteresse.
Le sacrifice de la garde papale
A cette occasion, la garde papale s’est battue courageusement pour bloquer le chemin de l’envahisseur, aidant le pape à se retirer, mais elle a été massacrée. En 1565, sous le pontificat de Pie IV Médicis, d’autres modifications importantes ont été apportées avec la construction des murs de Borgo Pio, Vittorio et Angelico, marquant la transition du Passetto d’une structure défensive à un élément urbain intégré. Aujourd’hui, grâce à l’achèvement des travaux de restauration et à la nouvelle proposition de mise en valeur, le Passetto di Borgo revient nous raconter ses histoires. Il accueille les visiteurs dans un voyage qui unit passé et présent, offrant une expérience unique de découverte.
Les traces des batailles
Aujourd’hui encore, ses murs sont marqués par les nombreux coups d’arquebuse tirés par les mercenaires allemands. Le sac de Rome est le dernier grand drame lié au Passetto. A partir de la fin du XVIe siècle, le Passetto di Borgo a vu le déclin de sa fonction défensive mais pas l’intérêt pour les anecdotes qu’il avait évoqué. Parmi celles-ci, on raconte que Rodrigo Borgia, le pape Alexandre VI, l’utilisait pour se rendre aux appartements où il rencontrait ses amantes. De cette histoire est née une coutume très particulière, à savoir qu’en parcourant 77 fois les 800 mètres du Passetto, soit un peu plus de 60 km, les hommes qui avaient perdu leur virilité finissaient par la retrouver.
Le Passetto un chemin pour une prison
Outre à son rôle défensif, le château servait également de prison pour les prisonniers de haut et moyen rang. De nombreuses personnalités, tant du clergé que des familles les plus puissantes de Rome, furent enfermées ici vers la fin du Moyen Âge. Le pape Jean X avait d’abord été enfermé puis étranglé. Le baron Stefano Porcari qui avait tenté d’éliminer le pape, avait été arrêté puis éliminé. L’épisode du baron Porcari inquiéta tellement les papes, qu’une fois le danger passé, ils décidèrent de fermer l’entrée originelle pour créer un nouvel accès plus facilement contrôlable. La cellule la plus redoutée était celle de San Marocco, nommée ainsi par Bucardo, maître de cérémonie des Borgia. Il définissait ce cachot comme le plus sombre et le plus atroce.
Le parcours du Passetto di Borgo
De la Torre del Mascherino sur la Piazza della Città Leonina, à coté de la colonnade du Bernin, le Passetto di Borgo nous mène jusqu’au Bastion saint Marc au château saint Ange. Le parcours alterne deux niveaux. Le niveau supérieur, découvert, il offre une promenade panoramique avec des vues spectaculaires sur la basilique de saint Pierre. Le niveau inférieur, couvert, il représente le couloir secret qui permettait aux papes de se déplacer en toute sécurité des appartements pontificaux à la forteresse. À leur arrivée au Bastion saint Marc, les visiteurs sont accueillis par une salle aménagée pour l’occasion avec des œuvres et des objets qui racontent les événements historiques liés au Passetto et au château saint Ange.
Notes
- Adresse : Via del Mascherino, Piazza della Città Leonina
- La visite du Passetto n’inclut pas le Château Saint-Ange
- Entrée 10 euros
- Pour réserver vos visites téléphonez au +393479541221
- Ecrivez à arterome2@gmail.com
- Possible découverte lors de la visite Anges et Démons