Une rue de la Renaissance
La Via di Monserrato, l’une des rues les élégantes de Rome, relie la Via dei Banchi Vecchi, dont elle est une continuation, à la place Farnèse. Elle doit son nom doit à l’église de Santa Maria di Monserrato qui se trouve là. Dans le passé on l’appelait aussi la Corte Savelli parce que la noble famille Savelli, nommée maréchal de la Sainte Église romaine et gardien du conclave, y exerçait sa juridiction pénale. Elle transforma un édifice qu’elle possédait en tribunal et prison. Peu contaminé par le tourisme de masse, la rue a quelque chose d’austère. Dans cette rue, San Filippo Neri a vécu trente ans. De plus, à la Renaissance, des banquiers, des aristocrates et diverses courtisanes, dont Imperia, amante d’Agostino Chigi, y avaient vécu. Le parcours se déroule de la via Del Pellegrino et la place Farnèse.
Palais de Pietro Paolo della Zecca
Du numéro 16 à 21 de Via di Monserrato, on a la maison de Pietro Paolo della Zecca. Cette habitation avait été l’habitation d’Imperia, célèbre courtisanne favorite du banquier Agostino Chigi. La maison d’Imperia était l’une des résidences les plus somptueuses de Rome, où chaque petit détail était l’œuvre d’un artiste. On raconte que l’ambassadeur d’Espagne, attendant les faveurs d’Imperia et voulant cracher, ne trouva aucun d’endroit et il cracha sur le visage de son valet. Mais avant, le palais avait été bâti pour Pietro Paolo Francisci surnommé della Zecca parce qu’il était le responsable de la fabrique de monnaie papale sous le pontificat de Paul II. Le bâtiment date de la deuxième moitié du XVe siècle. Les façades étaient décorées de fresques dont il reste quelques vagues traces.
Palais Podocatari
Au numéro 20 de via di Monserrato se trouve le palais de Monseigneur Ludovico Podocatari. Il le fit bâtir à la fin du XVe siècle. Cet homme, était le médecin cypriote du pape d’Innocent VIII et secrétaire d’Alexandre VI Borgia qui le fit cardinal en 1500. Ce palais est l’un des rares exemples d’architecture civile où le Moyen Âge et la Renaissance se marient avec un équilibre surprenant. À la mort du cardinal, c’est son neveu Livio qui héritera du bâtiment. Il était protonotaire apostolique et évêque de Nicosie. Il embellit le palais avec des décorations sur la façade, aujourd’hui disparues. En 1565, le palais est vendu à la famille Della Porta et puis à la famille Orsini.
Le palais Incoronati De Planca
Au numéro 152 de la Via di Monserrato se trouve le palais Incoronati De Planca construit pour la famille Incoronati de Planca. C’était une famille originaire d’Espagne, installée à Rome au XVe siècle. En 1569, le bâtiment passe à G.B. Doni, puis aux familles Sacripante et Luparini. L’édifice présente une façade en brique où s’ouvre un beau portail en marbre surmonté des armoiries des Incoronati de Planca, un lion rampant et trois bandes obliques. La famille Planca, originaire d’Espagne, portait autrefois le nom de famille Incoronati. Ce nom a été transmis à ses héritiers par Coronato Planca, un juriste très célèbre. Il a été Conservateur de Rome en 1680. Famille très ancienne et noble comptait en Espagne des personnes de haute vertu, entre autres des chevaliers.
Le palais Bossi Ceselli
Le palais Bossi Ceselli construit à la fin du XVe siècle, était à l’origine entièrement recouvert de fresques. Il appartenait à Monseigneur Pietro Altissera, scriban apostolique et prélat mais aussi domestique d’Innocent VIII. Le palais devient par la suite la propriété de Francesco Radice, responsable de la Reverenda Fabrica di San Pietro. Dans son testament il laisse le palais à des religieuses qui y établirent en 1647 un hospice pour filles pauvres. A cette occasion, les religieuses feront rénover le palais tel qu’il se présente aujourd’hui. Il appartenait à la famille Bossi, originaire de Milan, dès 1748 et après l’unification de l’Italie, il passa à la famille Ceselli qui le restaura en préservant son aspect initial.
Palais Rocci Pallavicini
Au numéro 25 de Via di Monserrato on trouve le palais Rocci Pallavicini. Le palais a été construit au début du XVIIe siècle, d’après les plans de l’architecte Carlo Maderno pour le cardinal Bernardino Rocci, membre d’une famille originaire de Crémone, présente à Rome depuis le XVIe siècle. Bernardino Rocci, majordome et plus tard cardinal de Clément X, chargea Carlo Maderno de construire le palais familial. En 1759, les héritiers Rocci vendaient le palais à des ecclésiastiques. Au XIXe siècle, les Carmes s’installèrent près de l’église de sainte Marie des Victoires et le palais sera repris par la famille Pallavicini, qui entreprendra une série de rénovations, à la suite desquelles l’église fut démolie. La façade du bâtiment est formé de trois étages avec un beau portail surmonté d’un balcon soutenu par deux consoles.
Palais Capponi Coralli Dall´Olio
Au numéro 34 et 35 de Via di Monseratto on a le palais Capponi Coralli Dall´Olio. L’histoire originale de ce palais remonte au XVIe siècle, lorsque la structure appartenait à la famille Capponi, des Florentins installés à Rome. Par la suite la propriété passe à la famille Casali originaire de Bologne. Le bâtiment actuel remonte à 1840, lorsque la propriété passa à Domenico Dall’Olio. Il confie les travaux de restructuration à l’architecte Virginio Vespignani. Sur la façade s’ouvre trois doubles portes aux arcatures élégantes. Le reste de la façade se déploie sur deux étages au-dessus des corniches avec une mezzanine entre elles. Le palais passe à la fin du XIXe siècle aux Antonelli, à la famille du cardinal Giacomo Antonelli, secrétaire du pape Pie IX
Le palais d’Asta Sterbini
Juste en face du Palais Podocatari, au numéro 149 de Via di Monserrato on a le palais d’Asta Sterbini datant du XVII sec. Il appartenait à la famille D’Aste, originaire d’Albenga qui était présente à Rome depuis 1590, avec Giovanni Battista. C’était le banquier de la Curie, et s’enrichit considérablement. Il épousa Clarice Margani, de qui il hérita deux petits bâtiments situés sur la place Venise, démolis plus tard par ses neveux pour y construire le palais qui fut la résidence de la maman de Napoléon, Laetitia Bonaparte. Le palais d’Asta Sterbini probablement construit par Giovanni Antonio De Rossi, vendu au XVIIIe siècle aux Pericoli puis aux Sterbini a été transformé en appartements.
Palais Ricci
Au fond d’une place qui porte le même nom on voit palais Ricci. Il forme un angle sur une façade décorée. Les fresques datent de 1525. Elles sont de Polidoro da Caravaggio et Maturino da Firenze, deux artistes spécialisés dans cette technique qu’on appelle « graffiato ». De propriété d’une famille toscane qui s’installe à Rome au XVe siècle, bâti par l’architecte Nanni di Baccio Bigio, après avoir eu plusieurs propriétaires, dont Costanza Farnèse, fille de Paul III. Le palais a été achetée en 1577 par le cardinal Giulio Ricci. Sous les fenêtres du premier étage on voit une frise avec des prisonniers, des trophées dédiées à la grandeur de la Rome antique. Restaurée par Luigi Fontana il ajouta les peintures du deuxième et troisième étages.
Palais Mocari
Aux numéros 116-117 de Via di Monserrato se trouve un petit bâtiment du XVIe siècle où vécut Tina. C’était une belle courtisane, sculptée et peinte par nombreux artistes. Ainsi Rome en plus d’être la capitale de la foi, était aussi la capitale du sexe rémunéré ! On estime qu’à la Renaissance, sur une population de50.00 personnes il y avait 5 000 prostituées. Mais ce qui rend le bâtiment intéressant est l’anecdote à laquelle le est lié. A la fin du XIXe siècle, le propriétaire de l’époque, un certain Lorenzo Mocari, fit entièrement moderniser le bâtiment et, comme les critiques tombaient fortes et persistantes, Lorenzo Mocari fit graver sur l’architrave la devise, encore bien visible, « TRAHIT SUA QUEMQUE VOLUPTAS », qui signifie littéralement « Chacun est mû par son propre plaisir », mais qui signifie en pratique « Je fais ce que je veux ».
L’église de sainte Marie de Monserrato
L’église de Santa Maria in Monserrato, dédiée à la Vierge du sanctuaire espagnol de Montserrat, se dresse dans la rue qui porte le même nom. Elle s’installe au XIVe siècle à la place d’un édifice dédié à San Niccolò dei Catalani. L’histoire de ce lieu de culte commence en 1354 lorsqu’une noble espagnole décide de fonder un petit hôpital pour offrir des soins à ses compatriotes. Un siècle plus tard, en 1495 précisément, le pape Alexandre VI, le pape espagnol, décide de fonder la confrérie espagnole et il fait construire une église plus grande.
Maison de sainte Catherine de Sienne
Aux numéros 111 et 112, un petit édifice qui se distingue par un aspect différent par rapport tout ce qui l’entoure. Il s’agit du siège de l’archiconfrérie de sainte Catherine de Sienne bâti à l’endroit où se trouvait la maison de la sainte à Rome. L’édifice a été rebâti en 1912 à la demande de l’archiconfrérie elle-même, comme l’indique une plaque apposée sur la façade. L’édifice a été rebâti à l’image d’une maison où vivait sainte Catherine à Sienne, patronne de l’Italie et de l’Europe. Le bâtiment présente une façade en briques sombres avec trois terrasses en loggia, décorées de marbre et de travertin, sur lesquelles se dresse un ovale, un bas-relief avec la représentation de Senio et Ascanio avec la louve, symbole de Sienne. Selon la légende Senio et Ascanio étaient les fils de Remus, le jumeau de Romulus qui n’aurait pas été tué.
Palazzetto Giangiacomo
Au numéro 105 de la Via di Monserrato on trouve le Palazzetto Giangiacomo construit dans la deuxième moitié du XVIe siècle pour la noble famille romaine Giangiacomo et ensuite acheté par la famille Brechi. La façade est dotée d’un élégant portail en pierre, avec deux colonnes doriques, reposant sur de grandes bases encadrant l’arc en pierre qui soutiennent un balcon. Le balcon est encadré par deux autres colonnes en pierre se terminant par des chapiteau à l’aspect d’Atlantide. Les chapiteaux soutiennent le tympan et encadrent la grande porte-fenêtre, également surmontée d’un tympan semi-circulaire.
Corte Savelli
De la place Farnèse jusqu’à la rue Montoro l’espace était occupé par la Corte Savelli, une prison, en activité de 1430 à 1654. Initialement réservée aux juifs, elle finit par enfermer des criminels de droit commun. Selon des dispositions voulues par le pape Paul V, le repas des prisonniers ne devait pas coûter plus de sept baiocchi et demi et devait être composé de bon vin, et au moins une livre de viande par jour. Il était interdit de garder en cellule un nombre de personnes supérieur à celui qui était prescrit par les Supérieurs des Prisons. On pourrait penser à une prison modèle mais le nombre de suicides était élevés. Parmi les prisonniers célèbres on compte Beatrice Cenci et sa belle-mère. En 1655 de nouvelles prisons furent bâties et la Corte Savelli supprimée. Le bâtiment a été en bonne partie abattu à la fin du XVIIe siècle pour faire place à d’autres.
La place de sainte Catherine della Rota
Suit la place de sainte Catherine della Rota qui tire son nom de l’église du même nom qui s’y trouve. L’église dédiée à la sainte d’Alexandrie, martyrisée au IVe siècle pour ne pas vouloir renier sa foi. Le jour de la fête du saint, le 25 novembre, marquait officiellement le début de l’hiver et une cérémonie spéciale avait lieu dans cette église. La date de fondation de l’église est incertaine, la mention la plus ancienne remonte à 1186. L’église est indiquée comme paroisse dépendante de l’église de saint Laurent. L’intérieur a une seule nef bordée de trois chapelles. Le splendide plafond en bois du XVIe siècle provient d’une église disparue. La première chapelle à gauche voit le monument funéraire du grand graveur de Palerme Giuseppe Vasi, auteur de l’œuvre « Delle Magnificenze di Roma Antica e Moderna ».
Le palais Fioravanti
Enfin, au numéro 61 de la Via di Monserrato, à l’angle de la place Farnese, se dresse le palais Fioravanti. L’édifice date de la première moitié du XVIe siècle. Bâti pour le comte Antonio Massa di Gallese, un célèbre juriste il devient noble en 1540. Les comtes Massa occuperont des charges importantes dans l’administration de la ville. Ils ajouteront le nom de Cosciari au leur par héritage. La famille Massa Cosciari s’éteignit en 1722 et le palais passe à la famille Fioravanti, originaire de Pistoia. Par la suite il est vendu à la famille française de Cadilhac et à l’ancienne famille romaine de Calvi. Le bâtiment, restauré en 1930 par l’ingénieur Carlo Grazioli, présente une architecture assez similaire à celle du palais Farnèse.
Notes
- Découverte de Via di Monserrato lors de la visite de Rome à la Renaissance
- Visite possible tous les jours
- Aucune entrée prévue
- Pour réserver vos entrée écrivez à arterome2@gmail.com