Un quartier sur le Palatin
Lorsqu’en 42 avant J.-C. Octavien entra en possession de la maison de l‘orateur Hortensius Hortalus, en la confisquant, le Palatin devait apparaître aux visiteurs comme un vaste quartier résidentiel. Il était apprécié pour sa position surélevée et aussi parce qu’il était légèrement décentré par rapport à la centrale et affolée place du Forum. La présence, sur la colline du Palatin, d’illustres propriétaires dont parlent les sources antiques (dont Cicéron) avait progressivement conduit, de nombreux riches romains, à l’achat de tous les terrains d’habitation disponibles. Le résultat fut la naissance comme forme d’habitation, d’une domus disposée sur plusieurs niveaux. Ces maisons, centrées sur l’atrium, présentaient des salons, des salles à manger ou triclinium, des chambres à coucher ou cubiques et des pièces semi-souterraines particulièrement appréciées pour leur isolation thermique surtout l’été, pour échapper aux chaleurs torides.
La peinture antique
Le sous-sol du Palatin a ainsi conservé certaines pièces de ces riches demeures de la première moitié du Ier siècle avant J-C. Au cours des siècles, les étages supérieurs, de ces riches demeures, ont été détruits ou transformés lors de la construction des palais impériaux. La plus connue de ces domus républicaines est la maison des Grifi qui doit son nom à une précieuse décoration en stuc. Dans toutes ces maisons, le rôle de la peinture antique servait à souligner le prestige du dominus, du propriétaire. Cette peinture antique s’appuyait sur le répertoire des palais hellénistiques et des scénographies théâtrales. Des fresques avaient été créées en reproduisant des architectures disposées sur plusieurs plans, avec en arrière la reproduction de précieux revêtements de marbre. Ceci créait un jeu de miroir entre les motifs des sols et les murs ornés de fresques. Les décorations reproduites appartiennent au style II (l’un des quatre qui catégorisent la production picturale ancienne). Elles trouvent leurs plus hautes expressions dans les maisons d’Auguste et de Livie.
Vitruve et la peinture antique
Le premier auteur latin qui a longuement parlé de la peinture antique est Vitruve, autrement dit, le plus grand connaisseur d’architecture romaine. Dans son traité De Architectura, écrit à la fin du Ier siècle avant JC, Vitruve a consacré l’une des pages les plus intéressantes du VIIe livre à l’histoire de la peinture antique. Il nous dit que « les anciens imitèrent d’abord les revêtements de marbre ; suivi de la distribution de festons et des cadres. Dans un troisième moment, ils essayèrent aussi d’imiter des colonnes et des frontons détachés du fond et en perspective. Ils représentaient des scénarios tragiques, comiques ou satiriques. Dans les cryptoportiques, l’ornement pictural était représenté par une série variée de paysages … en même temps on représentait des simulacres de dieux ou des épisodes mythologiques ou des batailles ou des voyages comme celui d’Ulysse ».
La perplexité de Vitruve
Mais Vitruve apparaissait aussi particulièrement critique à l’égard des dernières tendances artistiques. « … Des choses insensées sont peintes sur les plâtres, à la place d’objets normaux et définis : au lieu de colonnes, des murs striés, à la place de frontons, des vignes et même des candélabres supportant des figures de petits temples, sur les tympans des temples. qui se dressent au milieu de fleurs tendres, qui présentent, sans aucun sens, de petites statues assises; ainsi que des tiges en forme de statues, certaines à tête humaine, d’autres de forme animale. Toutes ces choses n’existent pas, ne peuvent pas exister et n’ont jamais existé. Comment une canne peut-elle réellement soutenir un toit, ou un candélabre les structures d’un fronton, ou un ressort destiné à soutenir une statue assise, ou des tiges et des branches sortant tantôt de fleurs, tantôt de bustes ? Et même s’ils voient que ce sont des choses fausses, les hommes les aiment ! Ils ne sont plus capables d’apprécier ce qui est plausible et décent ».
L’appréciation de Pline l’Ancien
L’attitude violemment critique de Vitruve, fidèle aux principes artistiques qui ont façonné toute sa théorie architecturale, ne lui permettait pas d’apprécier la peinture fantastique et la liberté décorative exubérante de la peinture romaine de son temps. Cette désapprobation avait trouvé écho, dans la Naturalis Historia de Pline l’Ancien, qui n’appréciait pas le luxe, la richesse et le gaspillage excessif de l’argent de la peinture romaine. Pline louait les peintres grecs pour leur utilisation économe des couleurs. « Avec seulement quatre couleurs, ils ont réussi à créer des œuvres immortelles. Je parle de peintres très célèbres comme Apelles, Ezione, Melantius, Nicomaque, dont un seul de leurs tableaux a été acheté avec les revenus d’une ville entière. Mais aujourd’hui, nous n’avons plus de peinture. Toutes les meilleures choses se sont produites à ce moment-là, quand il y avait moins de ressources».
Les domus romaines
Au visiteur moderne, la maison romaine apparaît curieusement peuplée partout d’images peintes, rendues dans des couleurs brillantes et vives, souvent avec des tons qui se contrastent. Et donc, pour comprendre ces espaces domestiques privés romains il faut se doter d0une nouvelle façon de regarder les choses. Toutes ces couleurs, tous ces sujets, toutes ces forment avaient comme but de créer des espaces de représentations de lieux et de sujets, à mi-chemin entre réalité et imagination. La première clé de compréhension concerne l’existence de parcours stables, tant physiques que visuels, autrement dit les sujets peints et les couleurs définissaient les espaces. Le choix de la décoration soulignait la hiérarchie des espaces intérieurs. Et celui qui rentrait dans l’habitation pouvait distinguer les pièces qui étaient les espaces publics et celles qui étaient les espaces privés.
La peinture antique
La peinture murale qui étaient par ses formes et ses couleurs étroitement liée aux murs qu’elle recouvrait, commença immédiatement à imiter d’autres architectures installées sur un fond fermé recouvert de fines dalles de marbre. L’idée était de suggérer de nouvelles spatialités. Bientôt, les sujets des tableaux qui arrivaient à Rome comme butin de guerre dès le IIe siècle avant JC, finirent par envahir les habitations. Ces nouveaux sujets se mélangèrent avec les nombreux autres motifs élaborés par les nombreux artistes. Un nouveau répertoire pictural va prendre forme et reproduire des motifs, construire des modèles universels valables pour tout le monde romain. L’efficacité de la communication du monde des images était confiée à des peintres souvent anonymes, dont le travail était demandé par les riches propriétaires qui pouvaient exhiber les décorations les plus en vogue parmi leurs égaux de rang. C’était une façon de marquer l’appartenance à un système commun de références culturelles.
La domus d’Auguste
C’est à la résidence d’Octave, qui deviendra plus tard l’empereur Auguste de développer un nouveau goût pictural. C’est lui qui fit construire le premier palais sur le mont Palatin, et par sa position la maison d’Auguste devint le modèle à suivre. Les peintures sur les murs sont encore en très bonne état. Sur les murs, les couleurs créent des images qui s’étendent vers des vues scénographiques avec portiques et édicules, dans lesquelles s’insèrent des représentations inspirées de la religiosité traditionnelle ainsi que au monde exotique des cultes d’Isis. Ces peintures installent un art nouveau capable d’assimiler et de ré-élaborer les peintures des époques antérieures dans un langage original, en puisant dans les sujets les grands tableaux peints par les artistes grecs jusqu’aux miniatures des tissus d’ameublement.
Notes
- Visite possible tous les jours sauf 25 décembre, 1 janvier
- Billet conseillé S.U.P.E.R.
- Visite incluse dans la découverte des Forums et du Palatin
- Pour réserver vos visites écrivez à arterome2@gmail.com ou téléphonez au +393479541221