Janus le dieu à deux têtes
C’est lors d’une visite guidée du Forum Romain et Palatin ésotérique que nous allons rencontrer Janus, le dieu aux deux visages. Sans un vrai équivalent chez les grecs, c’est le plus ancien et le plus vénéré des dieux du Panthéon romain. Il est présent bien avant la fondation de Rome. Son culte remonte à une époque archaïque où les peuples italiques sont encore largement liés aux cycles naturels de la terre. Poussé par le vent de l’est, Janus suit cette ethnie mystérieuse, nos ancêtres les Indo-Européens. Comme eux, il s’installe en Europe, il y a de ça bien longtemps. D’ailleurs, lui aussi, comme le babylonien Marduk ou le phénicien El, il peut de son regard balayer l’espace dans tous les sens. Rien ne lui échappe. Ou peut-être est -il originaire de Thessalie? A Rome Janus a deux temples, aux portes grandes ouvertes en temps de guerre. Dans ses temples, on fait souvent des sacrifices, pour avoir des prophéties sur le succès des entreprises militaires. On fête Janus en janvier. C’est lui qui ouvre l’année avec le premier mois de lumière après le solstice d’hiver.
Qui était Janus
Janus, à peine débarqué dans le Latium, a le mérite de fonder sur la colline du Janicule, déjà habitée par des sauvages, un premier village hors des grottes. Il se marie avec la fille du roi Camiso qui s’appelle Camisa et ils ont pas mal d’enfants. L’un d’entre eux Tiberio donnera son nom au fleuve de Rome. Janus a une aventure avec Carna. une jolie nymphette qui comme Diane chasse et court dans les bois. Janus l’accueille chaleureusement Saturne, chassé de l’Olympe par Jupiter son fils. Saturne est arrivé à Janiculum (la ville fondée par Janus) sur un navire. Janus permet à Saturne de s’installer au pied de la colline du Capitole. Là, Saturne donne naissance à cette phase de la civilisation qu’on appelle encore l’Age d’Or. En échange de son hospitalité, Saturne donne au roi le pouvoir de voir à la fois l’avenir et le passé.
Son nom
Cicéron et Macrobe lient le nom Janus au mouvement. Pour eux le mot Janus vient du verbe « ire », aller. Effectivement selon Macrobe : « le monde se déplace en cercle, c’est l’éternel retour». Pour Ovide, (1er chant des « Fastes »), Janus est « Chaos ». Quand Chaos se dépare en air, feu, eau et terre, il devient dieu : Janus. Dieu des passages et des commencements, Il est aussi le « Maître des deux voies », les voies accessibles par les deux portes des solstices. Janus a de nombreux noms. On l’appelle : Divum Deus (Dieux des Dieux) Divum Pater (Père des Dieux) Ianus Bifrons (Janus bifrons) Ianus Cerus (Janus Créateur) Ianus Consivius (Janus procréateur) Ianus Pater (Janus Père) Pater matutinae (Père du Matin). Voici une prière qu’on adressait à lui et à Hécate: « Salut, ô mère des dieux, de nombreux noms, de belle progéniture; Salut, ô Hécate, gardienne des portes, d’une grande puissance; mais aussi à toi, ô Janus, géniteur, l’impérissable Jupiter ; bonjour Jupiter suprême; éclaire le chemin de ma vie, plein de marchandises, à éviter les maladies mortelles de mes membres et de l’âme qui délire sur la terre, tirer haut, purifié par des initiations d’éveil de l’esprit. «
Qui est-il en fait
Janus bifrons symbolise le passé et le futur. Il est l’ inexorable et le lent mouvement du passé vers le future, mais pas dans le sens d’un progrès. Mais dans le sens du temps, ici et maintenant est à la fois hier et demain. Janus est aussi bien le mouvement et que la fixité. Janus est omniprésent dans la religion romaine. De la naissance à la mort, il est là à tous nouveaux commencements. Il a donc une place primordiale dans la divination et dans les rituels. D’un point de vue ésotérique c’est le dieu du passage d’un état à l’autre de la vie. Cicéron nous dit dans son « De natura deorum » qu’on doit à Janus les offertes et les prières du premier matin. Il est l’ancien dieu et roi du Latium. A sa façon, ce dieu bienveillant et magnanime a donné aux aborigènes la « civilisation » et fondé une ville sur le Janicule. Il est le père du dieu du Tibre, Tiberino. Il va donner asile à Saturne ouvrant ainsi l’Âge d’Or.
Ses temples
Essentiellement il en avait deux, l’un au Forum romain, l’autre au Forum olitorio. Celui du Forum romain, était à cheval sur l’Argileto, la chaussée qui passait entre la basilique Emiliènne et la Curie en direction de la Suburra. Formé d’un arc avec deux entrées, cet arc était le sanctuaire le plus important dédié à Janus. On avait placé la statue du dieu au centre du passage. Le temple était fermé en temps de paix. Ce qui n’arriva que sous le règne d’Auguste, de Néron et Vespasien après la prise de Jérusalem. Le temple avait été ouvert pour la dernière fois sous le règne du jeune empereur Gordien III. Aucun vestige du temple n’a été retrouvé, peut-être parce que le monument était en bronze. Le deuxième temple de Janus était celui au Foro Olitorio. Il fut construit par Caio Duilio lors de la première guerre punique. Du temple, aujourd’hui, il reste sept colonnes incorporées avec une architrave dans le côté droit de l’église de san Nicola In Carcere ainsi que deux colonnes surélevées sur la base du temple près du théâtre de Marcel. Il y en avait un aussi sur la colline du Gianicule.
Ordre civil et social à l’humanité
Janus, en apportant l’ordre à l’humanité, la fait passer de la barbarie à la civilisation. Ses deux têtes marquent alors, le passage du passé au future, avec ses regards tournés à la fois vers passé et l’avenir. Ce dieu venu de la nuit des temps est le témoin d’une tradition primordiale commune à toute l’humanité. Sa valeur ésotérique fut longtemps incomprise. Mis à l’écart, ne sachant pas comment l’aborder, il est resté dans l’ombre mais il n’a jamais disparu. Selon Macrobe, écrivain latin, Janus est aussi le dieu des solstices. Il est donc lié à l’étoile de notre astre solaire. A l’appui de sa thèse, Macrobe rappelle comment le jour des solstices est avant tout sacrifié à Janus. On l’appelait d’ailleurs « Pater matutinae », le père du matin. Il suffit alors de penser aux deux Saint-Jean, le Baptiste et l’Evangeliste. Ils correspondent à deux moments différents de l’année, passé et futur. En un mot, passant de la Rome des Césars à la Rome de Pierre, il est dieu des solstices et il devient les deux saint Jean.